Mais qu’est-ce qu’un canon de la beauté ? C’est une règle fondée sur une observation rationnelle de la nature, mais révisée selon un système de rapports et de nombres, qui permet d'établir les proportions et les formes d'un type humain idéal.
- Le canon Égyptien est incarné par Néfertiti
Buste de Néfertiti, calcaire peint, Neues Museum, Berlin, v. -1345
- Le canon grec
À la différence du canon égyptien, qui est seulement deviné, l'existence du canon grec n'est pas douteuse. On peut citer 3 sculpteurs majeurs de l’Antiquité qui ont contribué à fixer les canons esthétiques. La silhouette a tendance à s'étirer, la tête,quant à elle, rétrécie. Les figures prennent position dans l'espace, les gestes sont plus amples mais la représentation est toujours idéalisée (musculature, proportions...).
- Phidias avec son Athéna Lemnia
Athéna Lemnia, Bronze, Dresde, 450 av. J.-C. |
Tête d'Athéna Lemnia |
- Polyclète avec son Doryphore
Doryphore, marbre, Musée Archéologique, Naples, 440 av. J.-C. |
- Lysippe avec l'Apoxyomène, l'Apollon du Belvédère et l'Agias
Apoxyomène, marbre, 205 cm, Musées du Vatican (Pio-Clementino), Rome |
- Le canon Médiéval
La femme idéale est dépeinte dans la littérature sous les traits de l'Iseult de Tristan, de la reine Guenièvre ou encore de la belle Hélène. La beauté idéale est celle de la jeunesse, celle de la pucelle. Le corps de la jeune fille symbolise la pureté et la blancheur de l'innocence. La femme, par la suite, n'est plus aussi attirante, tandis que la vieille femme est considérée comme le symbole de la laideur.
La belle dame est noble ; elle est grande, mince, blonde et sa peau est blanche. Elle a un long cou, de longs doigts. Elle a les yeux gris et ressemble à une rose.
Pour les hommes le canon est bien plus facile à préciser, il n’en existe pas vraiment : l’idéal de beauté médiéval pour un homme c’est simplement qu’il soit un guerrier. Il doit donc être grand, fort, avoir des épaules larges, mais surtout, il doit avoir de bonnes cuisses.
L’iconographie de Marie permet de mieux préciser cet idéal de beauté. Marie est d’ailleurs un idéal de beauté.
Notre-Dame d'Orcival, XIIème siècle |
Vierge à l'Enfant de la Ste-Chapelle, Musée du Louvre, XIIIème siècle |
Vierge à l'Enfant, Musée du Louvre, Paris, XIVème siècle |
Nostre Dame de Grasse, Musée des Augustins, Toulouse, 1451-1500 |
Si une femme incarne la beauté non pas rêvée mais réelle, en France au XVème siècle, c’est bien Agnès Sorel et pour ne pas sortir de cet exemple de la Vierge, Agnès Sorel représentée en Vierge à l’Enfant.
Jean Fouquet, Vierge à l’Enfant, huile sur bois, 94 cm x 85 cm, Musée des beaux-arts, Anvers, ap. 1452-1455 |
- Le canon à la Renaissance
La Renaissance redécouvre l'Antiquité, qu'elle considère comme un âge d'or. La nudité n'était pas perçue comme provocante, mais dévoilait la sensualité et l'esthétique du corps. C'est à travers leurs œuvres que les artistes partageaient leur conception de l'idéal féminin, même si pour cela ils travestissent la réalité.
Pour pouvoir représenter, des corps avec des proportions divines, des artistes ont établis des proportions idéales qui rapprocheraient l'Homme de la perfection divine. On peut voir cette recherche à la divine proportion avec L'homme de Vitruve, de Léonard de Vinci.
- Les cheveux devaient être longs, tressés et entrelacés de perles et de pierres précieuses. C'est à cette époque que nait le célèbre blond vénitien.
- Le teint blanc : le bronzage était proscrit. En effet, la blancheur était de mise, le teint diaphane était un canon de beauté.
- Le rouge pour les lèvres et les joues : Les femmes avaient également pour habitude de se pincer les joues et de se mordre les lèvres car la rougeur était de mise.
- Les seins étaient fermes et la taille très fine, sans bourrelet.
Lucas Cranach, Venus debout dans un paysage, Musée du Louvre, Paris, 1529 |
Titien, Venus à sa toilette, huile sur toile, 124 cm x 105 cm, National Gallery of Art, Washington, v. 1555 |
- Les canons du Grand Siècle et des Lumières
La marquise de Montespan entourée de ses quatre premiers enfants légitimés, en 1677, Château de Versailles, v. 1677 |
Au début du XVIIIème siècle, le corps entier est structuré, cadenassé. Les bustes sont serrés à l'extrême, le col est maintenu. On se cache, on se protège. L'artifice prévaut. Les hommes mettent de fausses hanches, de faux mollets avec les bas, des attelles pour rectifier les épaules tombantes, des sachets de senteurs sous les bras...
Cependant, au milieu du XVIIIème siècle, un virage s’opère : un retour au naturel. On se maquille moins : la femme idéale de l'époque doit avoir un teint de porcelaine aussi naturel que possible et les lèvres douces. Bien que bouclés et poudrés, les cheveux adoptent un style savamment "décoiffé". La femme n'est plus une beauté statique engoncée dans des costumes trop étroits pour elle.
François Boucher, La marquise de Pompadour, Alte Pinakothek, Munich, 1756 |
- Le canon au XIXème siècle
Le XIXème siècle fait place à deux canons de beauté contradictoires. Le premier est appelé la « belle malade », il montre une femme malade et fragile. Ses principales caractéristiques sont le teint livide, la maigreur avec les joues creuses et des yeux cernés pour la fatigue. Cela met en avant le désespoir de ces femmes, d'un point de vue masculin ces critères les rendent mystérieuses, et elles sont donc fantasmées.
Charles Mangin, Sappho, huile sur toile, 230 cm x 151 cm, Manchester Art Gallery, Manchester, 1877 |
L'autre modèle, complètement opposé au premier est appelé « la petite bourgeoise ». Les femmes de ce modèle ont une corpulence plus importante qui incarne la fécondité, et elles mettent en avant leurs formes par des faux-culs et des corsets.
Ingres, Le bain turc, huile sur bois, 108 cm x 108 cm, Musée du Louvre, Paris, 1862 |
- Le canon au XXème siècle
Le début du XXème siècle laisse place à une femme contemporaine, provocante et libérée. Les femmes se rebellent contre les traditions du passé et osent un look androgyne sous l’influence de grands couturiers. Ce nouveau look incarne l’émancipation des femmes. Coco Chanel libère le corps des femmes en lançant la mode des vêtements simples et pratiques comme le pantalon pour femme, ce qui engendre des changements dans leur mode de vie.
Désormais elles peuvent faire du sport, conduire, et travailler. La mode étant bouleversée, elle va aussi influencer la silhouette de la femme. Ainsi la nouvelle silhouette féminine n'est plus marquée par la poitrine ni par la taille. Désormais la femme doit être mince mais en bonne santé. C’est aussi l’apparition de la coiffure « à la garçonne », avec des cheveux courts au carré. Louise Brooks était la figure emblématique de cette nouvelle mode.
Louise Brooks |
Silhouettes à la mode en 1920 |
Après la seconde guerre mondiale, un nouvel idéal féminin est apparu dans lequel la minceur est symbole de mauvaise santé. Les femmes commencent à préférer l’élégance et le chic. Marilyn Monroe devient une icône pour ces femmes qui se voulaient blondes et sensuelles. Les critères étaient alors une poitrine généreuse, des lèvres pulpeuses et un corps harmonieux. C’est Hollywood qui crée un nouvel idéal féminin : blonde et sensuelle, l'actrice hollywoodienne a toujours un air de Marilyn.
Marilyn Monroe |
Le cinéma continue de créer la femme. Les grands écrans révèlent des stars jeunes et pulpeuses : Liz Taylor, Sophia Loren, par exemple. Dans les publicités, les pin-up prolifèrent : ces femmes sensuelles et maternelles rassurent ; leur corps est celui de l'abondance et de la bonne santé. C'est aussi la fin du teint pâle : le visage hâlé, synonyme d'une vie sportive et aérée, est désormais de mise.
Sophia Lauren |
- Aujourd'hui ?
Le corps a toujours été soumis à des normes strictes : corsets, faux-culs... Mais aujourd'hui il y a un culte de la minceur. De nouvelles valeurs se mettent en place comme les régimes, les opérations, la chirurgie esthétique ou autre. L’idée étant d’avoir un corps parfait : s’il est imparfait on peut agir dessus pour le rendre parfait. Les femmes aujourd’hui veulent correspondre à un idéal mais contrairement aux années précédentes, celui-ci ne se matérialise pas par une femme en particulier. Cet idéal relève plutôt de l'imagination et peut être très différent selon les femmes. Le bronzage est de mise, la minceur, la taille très élancée... Tous ces critères sont des signes de bonne santé mais également des signes sociaux : les couches favorisées sont moins sujettes à l’obésité...
Les classiques de la peinture revisités selon les normes actuelles par l'artiste italienne Anna Utopia Giordano :
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